Début 2018, dans le parc locatif privé, on ne recensait pas moins de 700 000 biens classés G sur leur Diagnostic de Performance Energétique (DPE), qui seraient donc interdits à la location dès 2025, et 980 000 classés F interdits dès 2028.
La course aux travaux de rénovation énergétique est donc lancée, course car le délai est court et que les conditions de marché actuelles poussent les propriétaires bailleurs à se dépêcher, précipitation propice à de multiples arnaques à la rénovation énergétique !
Un chantier gigantesque … au pire moment !
Car ce n’est pas seulement le parc locatif privé qui est concerné par ce chantier de rénovation énergétique. Ainsi, avec le parc locatif social et celui des propriétaires occupants, ce n’est pas moins de 5 millions de logement classés en F ou G qui devront être rénovés. C’est dire l’ampleur de ce chantier !
Et si les logements destinés à la location devront être « réhabilités » sous peine de ne plus pouvoir être loués, les propriétaires occupants sont également incités à « upgrader » énergétiquement leurs biens par différentes aides telles MaPrimeRénov ou les multiples primes énergie.
Jamais on n’aura engagé un tel chantier de rénovation dans des délais aussi courts ! Autant dire que nombre de métiers du bâtiment vont se retrouver sous tension et que la difficulté pour un propriétaire ne sera pas de trouver le meilleur artisan mais … d’en trouver un ! Donc adieu les multiples devis comparatifs car l’heure ne sera plus à la multiplication des devis pour des professionnels au temps devenu si précieux !
Mais, outre ces métiers sous tension, l’époque incertaine que nous vivons, pas encore sortis d’une pandémie et déjà entrés dans un conflit européen aux développements imprévisibles, ajoute son lot de difficultés. Sous-productions pendant les confinements, chaines logistiques bouleversées, envolée du coût des énergies, il n’en fallait pas plus pour provoquer de multiples pénuries et une envolée des prix. Les chantiers à venir devront donc également s’accommoder des pénuries de matériaux déjà visibles ainsi que de l’augmentation des coûts de fabrication et de transport. Pour ces futurs chantiers de rénovation énergétique contraints par les délais, ce ne sont donc que des mauvaises nouvelles !
Une période propice aux arnaques !
Les difficultés pour lancer ces multiples chantiers font donc la part belle aux escrocs de toutes natures face à des propriétaires pressés et donc moins regardants.
Ainsi les nombreuses plaintes déjà enregistrées par la DGCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) ont fait remonter les pratiques utilisées pour abuser les propriétaires.
Tout commence par le démarchaghttps://www.economie.gouv.fr/dgccrfe. Mais tout d’abord il faut savoir que le législateur a décidé d’adopter le principe d’une interdiction pure et simple de la prospection commerciale par voie téléphonique dans le secteur de la rénovation énergétique (loi n° 2020-901 du 24 juillet 2020 visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux - article L.223-1 alinéa 3 du code de la consommation). Mais bien évidemment cela n’empêchera les appels insistants de sociétés (parfois crées pour l’occasion !) se prétendant spécialisées dans cette nature de chantiers ou se réclamant d’organismes publics ou de fournisseurs d’énergie. On ne saurait donc trop conseiller d’éviter de laisser sur certains sites internet non usuels ses coordonnées téléphoniques dont on sait qu’elles seront revendues pour être exploitées commercialement !
Le démarchage à domicile est l’approche la plus utilisée et fait l’objet de bien plus d’abus. Susciter l’inquiétude, jouer l’urgence, promettre une remise exceptionnelle ou une aide de l’état fantaisiste, inventer des références ou des qualifications sont les approches classiques visant à peser sur la décision du propriétaire. Encore une fois mieux vaut temporiser, ne rien signer sans avoir pris le temps de la réflexion et exiger un devis, même si dans le cas d’un démarchage, la remise par le professionnel d’un devis n’est plus obligatoire. Pouvoir comparer au moins 2 devis, prendre le temps de se renseigner sur les entreprises, leurs qualifications et leurs références sont des principes de base pour limiter les arnaques. Et il faut se souvenir qu’un contrat signé à la suite d’un démarchage à domicile doit contenir un bordereau de rétractation qui permet de l’annuler dans le délai de 14 jours sans justification ! Enfin il faut savoir qu’il est interdit au professionnel de percevoir une quelconque contrepartie financière (remise d’un RIB, d’un mandat SEPA, d’un chèque d’acompte ou d’espèces) pendant un délai de 7 jours.
Mais le grief le plus courant porte sur la qualité des travaux réalisés : chantier bâclé ou jamais terminé, qualité des matériaux utilisés, … Dans ce cas il importe de ne pas signer l’attestation de fin de travaux qui confirme que la prestation de services a été correctement et entièrement réalisée, conformément au bon de commande, et qui donc engage le propriétaire. Et en cas de litige, il est toujours possible de recourir à la médiation de la consommation sur le site suivant : www.economie.gouv.fr/mediation-conso.
Une règle : temporiser !
Les milliards d’euros engagés par l’état et les propriétaires dans ce gigantesque chantier de rénovation énergétique ne pouvaient qu’attirer une faune d’escrocs de toutes natures. Le maître mot pour éviter d’en être victime est bien la retenue car c’est souvent sur une prétendue urgence de signer que s’appuient les escrocs pour ne pas laisser le temps de la réflexion à leurs proies et ainsi les abuser.
Car la précipitation est mauvaise conseillère !