De nombreux indicateurs permettent de juger de la santé d’un marché et il en est de même pour le marché immobilier locatif. Ainsi le ratio des annonces « à louer/à vendre » est-il régulièrement scruté pour y apprécier aussi bien la propension du marché à l’achat que son aversion à la mise en location.
Et l’évolution de cet indicateur inquiète les acteurs de ce marché. Car le site Bien’Ici, acteur majeur de l’annonce immobilière professionnelle, rapporte que si, en 2019 avant la pandémie il affichait 1 bien en location pour 2 en vente, le ratio n’est plus aujourd’hui que de 1 pour 3, ce qui signifie que les 3/4 des annonces concernent maintenant des biens en vente … et surtout que l’offre locative semblerait donc se tarir !
Des mesures décourageantes
Il est vrai que depuis 2 ans il vaut mieux, pour un propriétaire bailleur, avoir les nerfs solides. Car les mauvaises nouvelles s’accumulent !
Tout d’abord, la pandémie a fortement bousculé le marché locatif : confinements, télétravail, études en distanciel, baisse de l’activité économique, …, des changements qui, liés à l’incertitude du lendemain, sont peu propices aux projets de changement de domicile !
Mais ensuite le vote à l'unanimité par l'Assemblée nationale le lundi 12 avril 2021 de l'interdiction de mise en location de presque 2 millions de logements dits "passoires thermiques" qui cible les logements les plus énergivores classés G sur le diagnostic de performance énergétique (DPE) dès 2025 puis les biens classés F dès 2028. Sans compter la nouvelle méthode d’évaluation de la performance énergétique (le nouveau DPE du 1° Juillet 2021) avec ses péripéties de démarrage et ses surprises sur l’appréciation de la performance énergétique des biens. Et pour ne rien arranger, la loi interdit, dès le 25 août 2022 en métropole, la hausse du loyer des logements énergivores classés F et G, que ce soit au moment de la signature d’un nouveau contrat de location ou en cours de bail.
Enfin, cerise sur le gâteau, il est probable que soit voté sous peu, dans le cadre des mesures gouvernementales imaginées pour contrer l’inflation, un « bouclier loyer » c’est-à-dire un plafonnement de l’indice de référence des loyers (IRL) à 3,5% ce qui limitera la réévaluation de loyer que les bailleurs peuvent appliquer à la date anniversaire du bail pour tenir compte de l’inflation.
Autant dire qu’avec cet enchaînement de mauvaises mesures l’exploitation locative d’un bien devient bien plus « acrobatique » et le calcul de sa rentabilité locative plutôt fluctuant !
Un indicateur interprétable
Pour ne pas noircir le tableau nous n’aborderons pas (ou alors à peine !) l’ambiance politique issue des dernières élections présidentielles/législatives qui voit l’image du propriétaire bailleur de plus en plus assimilée à celle d’un exploiteur de misère, riche (bien sûr !) et sans scrupule !
On comprend dès lors un peu mieux les propriétaires qui se libèrent de ces contraintes en revendant leur bien ou en s’orientant vers la location saisonnière qui, étonnamment, ne subit aucune contrainte en matière de performance énergétique ou de blocage de prix. Il est donc certain que ce contexte ne peut qu’affecter une offre locative pourtant déjà déficitaire par rapport à la demande.
Mais que le nombre d’annonces de location soit à la baisse et que les ventes augmentent ne signifie pas que beaucoup plus de français deviennent propriétaires, d’autant que les conditions pour le devenir (prix de l’immobilier, hausse des taux d’intérêts) ne semblent pas s’y prêter ! Il est donc assez probable que nombre de ces biens nouvellement achetés seront remis sur le marché locatif, après remise aux normes énergétiques par exemple et, bien sûr, réévaluation du loyer pour tenir compte des travaux réalisés.
Il n’est donc pas avéré que l’augmentation des annonces de vente se fassent au détriment du nombre d’annonces de location, ces deux mouvements peuvent être parallèles et indépendants, sans effet de vases communicants.
Prendre du recul
Ce qui est certain, en revanche, c’est que le marché du locatif peine à se sortir d’une conjoncture défavorable, où l’incertitude ne pousse pas au déménagement !
Mais un investissement locatif se juge sur le long terme et les conjonctures se suivent sans se ressembler !
Et si les mesures et conditions de marché actuelles affectent le marché défavorablement, nul doute que cela devra être (et sera) corrigé, par la loi ou le marché, car … il faudra toujours loger des millions de locataires !