Le taux d'usure a enfin été relevé le 1er octobre 2022, fixant le taux maximum légal d’un crédit immobilier à 3,05% pour un emprunt de 20 ans et plus, et à 3,03% pour un prêt d'une durée inférieure.
Cette annonce met fin à un suspens de plusieurs semaines pendant lesquelles partisans d’une refonte de la formule de calcul du taux d’usure et partisans du statu quo se sont démenés pour imposer leur point de vue.
Un mode de calcul remis en question
Car si ce sujet est d’importance pour les prêteurs et les emprunteurs, il était devenu vital pour certains intermédiaires tels les courtiers en prêts immobiliers qui voyaient les dossiers de prêts de leurs clients refusés les uns après les autres.
Pour rappel, le taux d'usure est destiné à protéger les particuliers de conditions d'emprunt abusives. Il plafonne l'ensemble des frais d'un prêt immobilier : taux de crédit pratiqué par la banque, éventuelle commission des courtiers, assurance emprunteur. Le calcul du taux d’usure est trimestriel et prend en compte les taux moyens pratiqués par les banques au cours des trois derniers mois augmentés d'un tiers. Tout demande de prêt immobilier dont le coût (les frais) dépasse le taux d’usure doit être rejetée. Cette méthode de calcul, en décalage de 3 mois avec les augmentations de taux immobiliers, pose donc problème en cas d’augmentation rapide des taux d’emprunts, ce qui est le cas aujourd’hui.
Ainsi, le précédent taux d’usure, pour le 3° trimestre 2022, était de 2,29% pour un emprunt de 20 ans et plus. Mais les taux d’intérêt commençant dès le mois de juillet à flirter avec les 2%, autant dire qu’avec quelques frais de dossier plus une commission de courtier la barre du taux d’usure était souvent dépassée. A tel point d’ailleurs que pour faire passer quelques dossiers certaines banques ont commencé à court-circuiter leurs courtiers immobiliers pour s’affranchir de leur commission !
Nouveau taux d’usure … déjà trop tard !
La Banque de France, qui fixe chaque trimestre le taux d’usure a réfuté, par la voix de son gouverneur, la proportion de 40 à 45% de prêts refusés avancée par les courtiers et réaffirmé que les taux d'usure ne bloquent pas les dossiers immobiliers actuellement. Toute idée de changement du mode de calcul du taux d’usure pour prendre en compte une croissance rapide du taux d’intérêt sur les crédits immobiliers a donc été écartée.
Le nouveau taux d’usure du 1° octobre, calculé selon la formule habituelle, va-t-il dénouer la situation ? Eh bien non car lundi 26 septembre, l’OAT à 10 ans, le taux d'emprunt à dix ans de l'État français a atteint un plus haut historique. Le rendement de la dette française a ainsi atteint 2,71%, alors qu’il plafonnait à 1,2% en mars, après des mois sous la barre des 1%. Les banques se basant sur les OAT pour fixer leurs taux de crédits immobiliers, … vont donc les augmenter encore jusqu’à rattraper un taux d’usure « déjà périmé » : à peine fixé, déjà dépassé !
La course poursuite entre les taux immobiliers et le taux d’usure n'est donc pas prête de prendre fin.
Pas de solution sans changement de méthode !
Malheureusement, sans changement de la formule de calcul des taux, le seul moyen pour dénouer cette situation est de limiter l’augmentation des taux immobiliers ... mais cela ferait baisser le taux d’usure et donc multiplier à nouveau les refus de dossiers !
Il semble donc que seule l’adaptation de sa méthode de calcul permettrait au taux d’usure de ne plus être un frein à l’investissement immobilier. Mais peut-être que la limitation de l’activité immobilière a été considérée comme nécessaire pour contribuer à freiner l’importante inflation qui mine notre économie ? Et dans ce cas le taux d’usure joue bien son rôle !
Affaire à suivre !